Histoire du Château de la Tour
Située sur la commune de Saint Pierre-Canivet, à 4 kms au nord-est de Falaise, le Château de la Tour avoisine par ses terres les domaines d’Aubigny, de Longpré et de l’ancienne abbaye cistercienne de Villers-Canivet.
C’est en 1444 que la famille de Séran entra en possession du fief de la Tour, ou de Canivet, qui lui fut accordé par le roi Henri IV avec lequel elle était revenue d’Angleterre. Elle l’a toujours conservé depuis et l’ancien propriétaire, le comte Alain de la Moussaye était descendant direct de la dernière des « Séran ».
A la fin du XVIIIe siècle, Madame de Séran fit du Château de la Tour (dont la construction venait d’être achevée) l’un des rendez-vous les plus célèbres des écrivains de ce temps. « Autour d’elle, disait Galeron, s’était formé une cour de beaux esprits, parmi lesquels on remarquait Delille ».
Delille et Marmontel vinrent plusieurs fois au Château de la Tour. Marmontel, dans ses mémoires, représente la Marquise Madame de Séran comme l’une des femmes les plus agréables de son temps.
Le domaine de la Tour est occupé en majeure partie par des bois : « les Bois du Roi » achetés au cours du XIXème siècle, ont été réunis au bois de la Tour proprement dits. Les uns et les autres s’étendent au sud et à l’ouest du château sur 430 hectares. Ils sont plantés d’essences très diverses: chênes, hêtres, bouleaux, sapins de Normandie. Dont certains atteignaient une hauteur exceptionnelle.
Le charme romantique de ces bois et leurs curiosités sont parfaitement décrits par Galeron : « On cite, dans les bois de la Tour, comme une beauté naturelle, très digne d’être visitée, une fontaine fraiche et limpide qui sort du pied des rochers, et qui forme un petit ruisseau dont les eaux s’écoulent avec une douceur infinie au milieu de sentiers tortueux, jusqu’aux douves du château. Nous ne croyons, en effet, qu’il y ait rien dans ce pays de plus gracieux que ces bocages. Les eaux, dans leurs cours, remplissent d’anciens fossés du milieu desquels s’élève une masse de bosquets qu’on nomme : « l’Isle d’amour ».
C’était le rendez-vous des poètes et des amants. Là, cependant, existait jadis un ancien châtel dont la mémoire s’est conservée dans la contrée. La source dont il est fait mention est qualifiée par les gens du pays de « fontaine bouillante » appellation qui a sans doute un sens plus sentimental que thermique. Tout près de là, sur une pierre ont été gravés des vers attribués à Marmontel:
-« Si tu sais réfléchir, contemple ce ruisseau :
Il doit te présenter l’image de la vie :
Que d’obstacles à vaincre ! Un enfant, un roseau
Peut contraindre sa marche au gré de son envie.
Mais, honteux d’en gémir, il triomphe de tout.
Il voit sans s’effrayer la pente qui l’entraine ;
Sa course est un travail, et la mort est au bout.
Mortel, ainsi que lui, supporte donc ta peine ! « –
L’ancien « châtel » c’était la forteresse de défense des Seigneurs de Séran, au temps des guerres civiles. Raven de Séran s’y était renfermé en 1589, et il y tenait pour le Roi contre la Ligue, quand il fût informé de l’arrivée des soldats de Brissac qui occupaient Falaise; il fût chassé de son manoir par ces pillards, et dans sa fuite, il aperçut les flammes qui dévoraient l’antique enceinte.